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LE KIDNAPPING D’ALFREDO DI STÉFANO 🔫⚽

Alfredo Di Stéfano est la première star mondiale de l’histoire du football. Joueur engagé socialement il fera avancer le statut de footballeur tout en éclaboussant les terrains de son talent. C’est l’un des rares à avoir porté le maillot de deux sélections nationales différentes, l’Argentine son pays de naissance, puis l’Espagne, son pays d’adoption. Mais au cours de sa riche carrière, emplie de succès, records et mésaventures en tout genre, le génie va vivre une séquestration improbable à l’été 1963…

Né en Argentine en 1926, il fait ses débuts en première division en 1945 à seulement 19 ans avec le club de River Plate et impressionne très rapidement. Après un prêt réussi au CA Huracán il vient prendre la relève du serial buteur Adolfo Pedernera et remporte un second titre de champion d’Argentine. Surnommé « la flèche blonde », Di Stéfano plante 55 buts en 75 matchs sous le maillot à bande emblématique de River Plate. Il dispute en 1948 le Championnat sud-américain des clubs champions regroupant les meilleurs formations d’Amérique du Sud et termine à une belle deuxième place derrière le club brésilien de Vasco da Gama.

Mais il connaît ses premiers accrochages avec son président, Di Stéfano militant pour des augmentations de salaires et la mise en place de contrat à durée déterminée. A l’époque les footballeurs bénéficient de conditions de travail médiocres et sont à la merci des clubs, qui en disposent comme ils le souhaitent. Raymond Kopa déclarera en 1963 : « Les footballeurs sont des esclaves. Le footballeur professionnel est le seul homme à pouvoir être vendu et acheté sans qu’on lui demande son avis ».
Alors que le championnat argentin 1948 bat son plein, la grève des joueurs professionnels force l’arrêt de la compétition et sous le leadership d’Alfredo Di Stéfano, ils obtiennent un accord en mai 1949. Seulement, après une tournée de bienfaisance en Italie pour venir en aide au Torino touché par un crash d’avion ayant décimé son équipe, le président de River Plate revient sur les accords signés et a également négocié dans le dos du jeune prodige un transfert au Torino. C’en est trop pour Alfredo, contacté par Pedernera qui évolue désormais au Millionarios de Bogota, ces derniers lui propose un contrat juteux et il s’enfuit en Colombie accompagné de son coéquipier Néstor Rossi. Le président de River Plate ne touchera aucune indemnité.

Son aventure colombienne va s’avérer un franc succès : il remporte 3 titres de champion de Colombie et termine par deux fois meilleur buteur. En 115 matchs sous le maillot bleu des Millionarios, Di Stéfano marque 100 buts et délivre d’innombrables passes décisives dans une équipe impressionnante surnommée « le ballet bleu » pour son son jeu bien rodé ressemblant à une chorégraphie. Malheureusement, la fédération colombienne n’est pas affiliée à la FIFA et les argentins comme Di Stéfano ayant quitté leur pays sont considérés comme des pirates et sommés de retourner dans leurs clubs d’origine en 1955. C’est hors de question pour l’avant-centre, mais heureusement, il se fait remarquer lors d’un tournoi organisé en 1952 pour les 50 ans du Real Madrid.

Alfredo se retrouve alors dans une rocambolesque saga de transfert : le FC Barcelone négocie avec River Plate et la future légende du Real Madrid va même disputer 3 matchs amicaux sous le maillot blaugrana. Le transfert semble acté mais les Millionarios, techniquement propriétaires du joueur jusqu’au 1er janvier 1995, souhaitent leur part du gâteau et demandent une contribution au Barça tout en portant plainte auprès de la FIFA et de la Fédération espagnole. Le Real Madrid y voit une opportunité et parvient à un accord avec le club colombien. Le président barcelonais voit rouge et tente de vendre Di Stéfano à la Juventus de Turin. Alfredo est à nouveau vendu sans son accord, engendrant sa colère. La FIFA intervient et nomme un médiateur qui, à la manière du roi Salomon, porte un jugement abracadabrantesque : l’attaquant jouera deux saisons au Real puis deux saisons au Barça, à l’issue desquelles les clubs devront se mettre d’accord sur l’avenir du joueur.
Cette décision mène à la démission du président barcelonais et la cession des droits du joueur au Real Madrid, potentiellement sous la pression du gouvernement de Franco. L’aventure madrilène d’Alfredo Di Stéfano peut enfin commencer ! Le joueur permet au Real de retrouver le titre de champion d’Espagne dès sa première saison, après une interminable disette de 21 ans et une domination sans partage du rival barcelonais.
La saison 1955/56 marque la première Coupe d’Europe des Clubs champions, ancêtre de la Ligue des Champions, que los blancos vont remporter face au mythique Stade de Reims. L’attaquant est naturalisé espagnol et va désormais porter les couleurs de la Roja après avoir brièvement porté celles de l’Argentine en début de carrière. C’est le début de l’âge d’or pour le club de la capitale qui va rafler tous les trophées possibles grâce à son serial buteur, couronné Ballon d’or en 1957 puis en 1959.

La « flèche blonde » est devenu « le divin chauve » avec les années mais sa notoriété est désormais mondiale, ce qui en fait une cible de choix pour un enlèvement. Le 24 août 1963, Di Stéfano est kidnappé par les Forces Armées de Libération Nationale du Venezuela alors que le Real Madrid dispute un tournoi d’exhibition à Caracas. Dupé par des faux policiers venus le tirer du lit à son hôtel, Di Stéfano va passer 70 heures otage des guérilleros vénézuéliens.
Ils ne souhaitent pas de rançon mais attirer l’attention sur la situation politique de leur pays. Pari réussi, le rapt de la superstar va faire les gros titres de la presse internationale. Alfredo sera bien traité et jouera aux échecs et aux cartes avec ses ravisseurs pendant pratiquement 3 jours avant d’être relâché et mis dans un taxi pour l’ambassade d’Espagne. Lui-même engagé socialement, il saura reconnaître les idéaux et le combat des révolutionnaires malgré la désagréable expérience.
Le président madrilène Santiago Bernabéu insistera pour qu’il joue le dernier match du tournoi le jour-même ! Di Stéfano retrouve son lieu fétiche, le terrain, pour tirer un trait sur cette histoire.

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